Quelques pages de bande dessinée de temps en temps.

Une critique essayant d'être intéressante à cette occasion.

Un aspect particulier de la bande dessinée à chaque critique.


vendredi 26 février 2016

La bande dessinée est un multi-mythe magique.

Sandman (le marchand de sable, le roi des rêves) nous montre ce qu'est la figure du magicien.

Neil Gaiman et toute un tripotée de dessinateurs qui changent sans arrêt, tellement que, d'habitude, on ne cite que Gaiman, 
et je vais pas échapper à la règle mais je vais quand même dire que c'est une traduction de Patrick Marcel,
Sandman, Urban Comics.

De manière assez évidente, le magicien a de grands pouvoirs, et de grandes capacités. Il change de visage. Il voyage dans le temps. Dès qu'il arrive quelque part, on le connaît et le reconnaît, soit parce qu'il est déjà venu et y a laissé sa marque, soit parce que sa réputation le précède. Mais son plus grand pouvoir est, avant tout et paradoxalement, sa connaissance quasi-illimitée, qui lui permet de faire des tas de trucs bizarres. 

  • Voyage dans le temps.
De son côté, Le Docteur possède une machine à voyager dans le temps, c'est donc lui qui peut le faire de la manière la plus évidente.

Une machine à voyager dans le temps qui a la forme d'une grosse boîte bleue.

MAIS il faut comprendre que la plupart des magiciens ne voyage dans le temps que de la plus simple des manière : en ne mourant pas. Ils voyagent dans le temps de manière simplement linéaire, en prenant leur temps et par le chemin, certes le plus long, mais le plus efficace. C'est le cas de Merlin, qui ne prend l'apparence d'un vieux mystérieux que pour coller aux clichés de son époque mais peut très bien apparaître à ses contemporain en bel éphèbe qui tombe toutes les filles (et tous les garçons). C'est le cas de manière un brin tirée par les cheveux de Arsène Lupin, qui inscrit sa trajectoire dans toute l'Histoire de France, en gagnant les trésors des rois de France dans l'aiguille creuse, ou en conquérant la moitié de l'Afrique pour son pays (il est très cocardier) dans les dents du tigre.

C'est le cas de Sandman. Le mec, il gère les rêves. Les gens rêves depuis pas mal de temps maintenant. 
Donc il est là depuis pas mal de temps. CQFD. Imparable.


Et donc il peut se permettre de narguer les humain sur le thème « toi tu vas mourir et pas moi, nananèèèrrreuh ».
Et puis ça fait le mec profond qui a compris la vie, donc, pour draguer, c'est pas négligeable non plus.

  • Changement d'apparence.
C'est le pouvoir principal de Merlin, qui prend l'apparence de ce qu'il veut, jeune garçon ou albatros, quand ça lui chante. Arsène Lupin, lui, est un génie du déguisement, à tel point que la moitié de ses aventures se passe en apparence sans lui, avant qu'on réalise que le petit vieux, le commissaire bagarreur, où le comte Machin-Truc sont en fait Lupin déguisés. Le docteur Fate est télépathe est peut se glisser dans l'esprit de n'importe qui.

Sandman, lui, bin il a un peu l'apparence que chacun imagine. Il est noir en Afrique, élisabéthain avec Shakespeare, 
chat avec les chats. Ce qui compte, c'est qu'il reste sexy, parce qu'il aime bien se la péter.

  • Pouvoir illimité.
Lupin a plus de pognon que la reine d’Angleterre. Le Docteur Fate accumule les connaissances de toutes les personnes qu'il rencontre. Le Docteur voyage depuis tellement longtemps dans tous l'univers qu'il connaît tout sur tout et a tout vu. Merlin parle aux arbres et aux animaux, est le fils du diable et connaît l'avenir. Chacun dans leur genre (plus ou moins réaliste), chaque personnage dispose d'une telle puissance de feu que, dès qu'ils se font un peu embêter, la question n'est pas « est-ce qu'ils vont s'en sortir » mais « comment le perturbateur ne va-t-il pas finir en pâtée pour chien avariée ».

Donc, voilà, Sandman, du coup, dans le rêve, il peut être super grand et super puissant et puis se la jouer. 
« Oui je vais te tuer, ou peut être pas, chais paaaas, j'hésiiite. Halàlà, on n'a pas des vies faciles... »

  • Folie douce.
Le revers de la médaille est que, tant de connaissances, tant de pouvoir, ça a un coût, et que, en général, le magicien yoyotte un poil de la toiture. Il a déjà un ego sur-dimensionné, mais, ça, c'est juste rigolo, et pas trop handicapant socialement. Par contre, il est un peu autiste sur les bords, et ne se rend pas toujours bien compte de l'impact qu'a ses actions sur ses contemporains et compagnons. Résultat, à force de jouer à l'apprenti sorcier, il se retrouve à un peu tout détruire autour de lui.

Merlin, et bin, bon, on peut pas dire que Camelot et la poursuite du Graal se termine dans la joie et l’allégresse. Le Docteur partage sans cesse la vie de compagnons qui finissent en ruines. Arsène Lupin est toujours bien seul, dans sa vie de Dominique-Strauss-Kahn-James-Bond-Je-Couche-Une-Fois-Pas-Deux. le Docteur Fate, c'est un peu différent, les connaissances auxquelles il est confronté le rendant, lui (et pas les autres), complètement zinzin au bout d'un certain temps.

Chez Sandman, bon, déjà, il connait des gens quand même un brin à côté de leurs pompes.


Mais disons qu'en plus il est compréhensif : la folie, chez lui, c'est plus une forme de rêve qu'autre chose.


Voilà. C'est ça. Sa folie le garde sensé. (À prononcer avec une grosse voix.) Je sais pas trop ce que ça veut dire, 
mais ça a l'air tellement profond que je vais faire comme tout le monde : je vais faire comme si j'avais compris.

  • Tout ceci pour amener à la caractéristique principale et commune à tous les magicien : il est tout triste dans son coin.

Sandman en fait, c'est un gros émo. Ou un romantique torturé qui a vu le vrai sens de la vie. Question de point de vue.

Tout triste parce que dès qu'il fait un mouvement, ça chie dans la colle pour les personnes autour de lui (et pas pour lui-même, vu qu'il est trop fort). Tout triste parce qu'il se retrouve à connaître et posséder trop de choses, sans but, sans pouvoir taper plus haut. Bref : tout triste parce qu'il se fait chier.

Le magicien nous offre ainsi un miroir inversé. L'ensemble de ses pouvoirs ne sont présents que pour créer un contraste et une distanciation entre nous et le personnage. On ne pourra jamais s'identifier à un tel gugusse surpuissant. J'ai déjà du mal à pas faire cramer mes œufs au plat, alors connaître le futur, c'est pas prêt de m'arriver.



De manière assez évidente, les rêves des gens servent de révélateur à leurs aspirations profondes, 
à ce qu'ils sont vraiment au fond d'eux. Quand le rêve arrive, les masques et apparences tombent.

Partant de là, deux solutions :

1°) Tous les personnages l'entourant nous paraissent tout d'un coup beaucoup plus proches de nous. On cherche à s'identifier à quelqu'un, ce ne sera certainement pas le magicien, du coup ce sera le personnage juste à côté, quel qu'il soit, il sera déjà plus normal et proche de nous. Et peu importe que ce soit le roi Arthur ou la princesse de Bohême. On marchera quand même à fond les ballons. Le magicien révèle par contraste la beauté de la condition humaine.

Là encore, j'ai pas tout compris, mais ça a l'air méchant (et très optimiste face à la condition humaine).

2°) Notre propre vie nous paraît soudain plus digne d'intérêt. Certes il est sur-puissant, sur-riche, il a amassé toutes les connaissances du monde et il peut te mettre la misère à Trivial Pursuit sans aucun souci. Certes on ne pourra jamais rattraper notre retard, puisqu'il voyage dans le temps et dans l'espace et est quasi-immortel. Mais il est MALHEUREUX de cette situation. Et vous savez quoi ? Les seuls moments où il est un peu heureux, c'est quand il a son petit shoot d'adrénaline de nouveauté. Quand il est confronté à une situation qu'il ne connaît pas ou qui le met simplement en difficulté. Là, il kiffe. Et vous savez re-quoi ? Nous, on sera tout le long de notre vie confronté à cette situation. Être en difficulté. Apprendre des trucs. Voir de nouvelles choses. Les mecs les plus puissants de l'univers prient à genou pour vivre les choses que l'on vit tous les jours.

Enfin, bon, bref : c'est un gros chouineur.

Tout d'un coup, les qualités des autres personnages apparaissent de manière plus flagrante quand ils sont confrontés au magicien qui, lui, est complètement lunatique, mégalomane, à la limite de la folie, anti-doué dans ses relations aux autres, complètement privé d'empathie. Les autres personnages, confrontés à ce demi-dieu, font ressortir leur qualités bien humaine : de compréhension, de solidarité, de rêves.

Ne pouvant s'identifier à la figure du magicien, perché bien trop haut pour nous, celui-ci nous jette dans les bras des autres personnages, que nous trouvons soudain bien plus séduisant, valeureux, courageux, profond, moraux qu'ils ne nous aurait paru précédemment.

Ou alors, sans vraiment nous jeter dans leurs bras, ça nous permet de bien mieux les connaître que nos collègues de bureaux 
qui font des blagues de cul à la machine à café le matin (ou alors ça nous permet de prendre conscience que le mec qui fait des blagues de cul le fait parce qu'il a une vie de famille difficile, que son chat est mort, et sa mère castratrice) 
(en fait, c'est faux,hein, il le fait parce qu'il est con, c'est tout).


Ce personnage de compagnon du magicien n'est plus un pauvre type un peu paumé qui fait tout de travers (Arthur qui foire sa quête du Graal dans les grandes largeurs et se fait piquer sa gonzesse, par exemple) (pourtant, là, j'ai pas choisi le plus moche, il est roi) (il est roi mais il rate tout quand même) mais un gars dont les qualités nous crèvent enfin les yeux (Arthur en chie, c'est sûr, mais il a un idéal, il s'y accroche, et ne lâche rien, malgré les épreuves).

Le magicien est comme la moutarde : il redonne goût et vivacité à des vies de personnages qui paraissaient grises et plates.

Le tour de magie de ce personnage est là. Transformer, par sa simple présence, notre regard sur la vie de tous les personnages qui l'entourent.

« Laissez-moi, maintenant, j'ai besoin de penser au sens de la vie. »

5 commentaires:

  1. Et là arrive l'inévitable question :
    mais alors, Gandalf, c'est un magicien ou pas ?

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    1. Évidemment. Tout comme Pacôme de Champignac et Deadpool. (Ne mentez plus ! Avec ces critères, toutes les pièces du puzzle se mettent en place : immortel, cosplay fréquent, conscient du 4ème mur, multiples personnalités... Il semble pas triste dans son coin mais eh ! Qu'en savez-vous ?)

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    2. Hha bah ouais, carrément, il a même toute la panoplie clichée : barbe blanche et chapeau pointu. Il est super puissant à base de trucs qu'il fait avec son bâton. Il vit depuis super longtemps (et ne meurt pas officiellement, il va aux Havres Gris et par delà la mer (un peu comme quand votre Hamster gris-gris est "parti en vacance loin loin loin, à la campagne, non on ne pourra pas aller le voir, mais il est super bien là-bas")). Il est tout triste aussi (même si, pour lui, c'est de la nostalgie de quand les hommes étaient puissants et faisaient trois mètres de haut). Alors, bon, effectivement, il change pas beaucoup-beaucoup de tête. Mais il passe quand même de Gandalf le gris à Gandalf le blanc. C'est pas si anodin.

      Moi je vote : Gandalf est un magicien

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    3. Pour ce qui est de Deadpool, effectivement, c'est troublant. Deadpool est un magicien. Un magicien qui se parle à lui-même habillé en soubrette, certes, mais peut-être bien un magicien.

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  2. Et dans le monde d'Harry Potter, c'est qui le magicien ? Dumbledore ? Voldemort ?
    Mais bien sûr, il s'agit d'Hermione ! Après tout, c'est elle qui a le plus de connaissances. Elle voyage dans le temps (certes en utilisant un artefact qui permettrait à n'importe qui de devenir maître du monde, heureusement qu'on ne lui a prêté qu'à elle et pas à Voldy). Quant au changement d'apparence, il n'y a qu'à voir sa transformation de gamine en bombasse.

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